vendredi 19 avril 2024

À la boîte blanche, vues 329


 

et ce paysage

 

et ce paysage est un concours de morts qui admet la vie

et qui l’étaye

la cépée écartelée du coudrier

la ramure passible d’un frêne pour l’ascension de lierre

 

qui perd gagne, et c’est l’éloge de la ruine

pour le socle solidaire, pour l’échelle infaillible :

rien n’achève jamais la chose achevée

 

(sauf peut-être mon œil épris de rationalité soudaine :

éclaircir pour relever ce muret)

la chose que je vois en championne toutes catégories de l’économie,

avec l’exaltation que cette art requiert

 

paysage vertical, monde profus, recomposé,

déjà ma phrase à vau-l’eau sur cet entrelacs éblouissant,

contre-jour

 

aveuglant de réalisme

 

jeudi 18 avril 2024

À la boîte blanche, vues 328


 

ma propre chair l’éprouve.

 

ma propre chair l’éprouve. Ma chair

en réponse, œil pour œil, pour évaluer

cette profondeur aggravée

(malgré ma difficulté à accommoder)

surtout qu’un automne s’est plu a glorifier la mort.

 

Là, il fait la roue, cet œil vulnérable

tout autour et au cœur de cette parade printanière

où ne reprend que ce qui l’entend

où ce qui est mort est là, pour autre chose,

entrelacs mystérieux d’utilités et d’usages,

 

avec un vieux seau et un ballon pour couronner

 

rentre dans mon paysage dit la haie

 

 

mardi 16 avril 2024

À la boîte blanche, vues 327


 

ce débordement par le haut

 

ce débordement par le haut

à tous les registres, bientôt indépassable,

que je devrai moi aussi tailler, yeux qui ne demandent qu’à voir,

gemmes miraculeuses, diaphanes dans le rai clair,

qui perlent à chaque embranchement

 

lundi 15 avril 2024

À la boîte blanche, vues 326


 

vers le coudrier

 

vers le coudrier qui redoutait le vent (ici aussi c’est

l’esprit de la vie qui taille dans la vie, ici aussi)

de plein fouet j’y vais, cinglée,

car de toute part la haie cerne le monde

et exulte (et m’exhausse, moi qui suis maladivement soumise à la terre)

 

dimanche 14 avril 2024

À la boîte blanche, vues 325


 

Je suis là.

 

Je suis là. J’avance vers le camérisier.

Une infime chose, puis une plus insignifiante encore

(l’humble perpétuation de son intensité vernale -

le si fin dessin de ses jeunes feuilles, la modicité

du feuillage mais d’intense clarté -)

 

samedi 13 avril 2024

vendredi 12 avril 2024

À la boîte blanche, vues 323


 

J’approche de la mancienne

 

J’approche de la mancienne, maussane,

pour ses cordons (pour mes fagots)

la fleur de lait caille déjà au centre

d’un déploiement de feuilles gaufrées.

Fuis en raison du parfum la viorne lantane !

 

jeudi 11 avril 2024

mercredi 10 avril 2024

À la boîte blanche, vues 321


 

comme en visitant la haie

 

comme en visitant la haie,

on relève les manques

 

on s’étonne des nouveautés

 

on devra questionner le fusain

comment vont tes hyponomeutes ? et de l’érable champêtre

 

scruter le haut lignage

(toi cocher qui tient la haie au cordeau

 

diligent aurige, maître

à la parade, de main de maître)

 

et où vas-tu ?

 

mardi 9 avril 2024

À la boîte blanche, vues 320


 

Printemps :

 

Printemps :

non non

le monde ne s’exilera pas du monde

(c’est seulement l’humain, lequel quelquefois…)

mais voilà l’illusion nous fait dire : rien n’est perdu,

alors qu’on le sait bien, c’est plutôt : tout n’est pas perdu qui s’avère l’expression

adéquate (nous nous rendrons bientôt compte du retentissement

par le vide,

ce pur scandale,

de tout ce qui n’a pas repris)

 

lundi 8 avril 2024

À la boîte blanche, vues 319


 

Attends attends attends

 

Attends attends attends

comme le rat dans l’âme

enroulée sur toi-même

que la fumée te porte dans une autre réalité ?

 

À coté une haie frémit qui est bien vivante.

 

dimanche 7 avril 2024

À la boîte blanche, vues 318


 

J’endosse la nuit

 

J’endosse la nuit, là, devant ce feu

il est 20 heures en mars

un trop vaste pardessus d’où mon transi

discerne de menues connivences entre les flammes.

 

Bien sûr ce feu est un lieu intense

- pas un sujet -

 

(et moi qui l’ai initialement allumé je suis l’accident,

la contingence (au mieux l’agent de liaison)

dans la nuit confondue en ce lieu -

rien moins que radicale -

 

ou bien étant la racine divertie

détournée de sa fin

j’incendie, j’affabule, je diverge)

 

qui a le pouvoir de mener à un autre lieu

de transfigurer le geste


mais l’expérience demeure incomplète

- infléchies les intentions

déviée la sensation -

(le procès suit la combustion des aromates et des sarments

se tortille avec eux et s’effondre en brasillant)

 

(c’est là la progression de mon histoire)

 

emportant tout le ressentiment


mais pas jusqu’à l’affliction.

 

samedi 6 avril 2024

À la boîte blanche, vues 317


 

alors je cède à la tentation de la chaleur

 

alors je cède à la tentation de la chaleur et je rêve.

 

Je tends les mains. Affres de tisons et d’épines, tandis

que le dos tourné vit l’autre effroi.

                                                                Tandis que toute la nuit vient se regrouper là,

il arme sa courbure - ô combien,

                                     combien porteuse -

et lui fait une monture consentie.

 

vendredi 5 avril 2024

À la boîte blanche, vues 316


 

car le feu est feu

 

car le feu est feu et n’a pas besoin de mon ardeur

- ma présence quémandant son motif comme gage d’authenticité -

pour brûler

et, à la rigueur, je devrais pouvoir me passer

de la réflexion - sans parler de la rétrospection -.

 

Car je choisis de me faire face en veillant ce feu

sentinelle de moi-même avisée

ou plutôt non

démunie

(puisque me manque toujours le fondement animal)

 

puis la flamme attisée relance - ce tétraèdre dont

rien ne manque -

alors je vois que le feu a sa fin dans la flamme

comme l’expérience dans la formule

 

jeudi 4 avril 2024

À la boîte blanche, vues 315


 

C’est que l’incendiaire que je suis

 

C’est que l’incendiaire que je suis

n’est ni tout à fait réfléchie

ni assez hardie : téméraire, non,

insouciante ?

Responsable. Je réponds de ce brasier

comme de la pensée

 

j’ai le feu au bout des mains : valide

ton feu de toujours

(mais n’en fais pas trop)

n’en remontre pas, gare à l’emphatique

flamme, voici

 

(voici comment je me parlai)

 

mercredi 3 avril 2024

À la boîte blanche, vues 314


 

thyms, marjolaines et sarriettes

 

thyms, marjolaines et sarriettes brasillent et elle rougeoie


tout un maquis dégueule

la lave incandescente jusqu’au noir profond

dévale la pente

 

optique à peine régulée par ma fourche

(ma vigile attentive qui resserre la focale)

 

mardi 2 avril 2024

À la boîte blanche, vues 313


 

Feu d’herbes

 

Feu d’herbes

(des foulées d’aromates à pied comptés)

ce sont les thyms, marjolaines - temps, tempos, en moult versions d’offrandes

et bouquets de l’antique absente -

que nous brûlons maintenant

 

que je regarde ainsi boursoufler la nuit

 

lundi 1 avril 2024

À la boîte blanche, vues 312


 

c'est pour mon feu, cet autre fanal

 

c'est pour mon feu, cet autre fanal 

que je rallume

tant s’amassent (et temps passe)

 

trament le récit de l’histoire

les liens trouvés

 

en cherchant l’animal qui manquait au foyer

soit qu’il faillît

(je faux avec lui, et avec le jour, jusqu’à la nuit,

encore et encore)

 

soit qu’il pérît.

 

dimanche 31 mars 2024

À la boîte blanche, vues 311

 

(je désapprends son nom de chiendent rampant

 

(je désapprends son nom de chiendent rampant

trop domestique, trop bon

qui ne dit pas son inclémence)

 

je traque sa mesure, son inflexible assiduité

 

c’est pour mon feu, cet autre fanal

 

samedi 30 mars 2024

À la boîte blanche, vues 310

 

soutien de terre et soutien de rêve

 

soutien de terre et soutien de rêve

et je noue (je renoue) avec le geste

 

je relie le geste et l’action

j’observe le chiendent tisser son territoire

 

mon domaine est sous-tendu comme le sien

d’actions simples,

exactement inverses

 

je remonte ses rhizomes de nœud en nœud : la souche traçante

qui agglutine la terre

conduit aux rudes feuilles


linéaires toujours vertes

(aux ombres mesurées je le trouve

en dur gnomon, en monstre flagellateur,

en tremblement de fanion)

 

le ralliement en est certes facilité

 

vendredi 29 mars 2024

À la boîte blanche, vues 309


 

Chiendent petit rampant

 

Chiendent petit rampant

(ta figure topologique)

comment ton armure est-elle passée

de la terre à mon rêve ?

 

Nouage

(en sous-main) tient

comme les fers le béton d’une terrasse 

 

jeudi 28 mars 2024

À la boîte blanche, vues 308


 

Connecte tes quêtes

 

Connecte tes quêtes (toutes tes quêtes),

force ta vision (je m’ordonne)

une fourche trident à la main pour recentrer la flamme

 

l’œil et le mufle jouent ensemble au bout du champ de mon rêve

juste dans ma paume

 

juste devant moi

 

lequel appellerai-je, lequel attendrai-je dorénavant ?

 

mercredi 27 mars 2024

À la boîte blanche, vues 307


 

À l’échelle de ce rat

 

Était-ce un tertre, une fortification ?

À l’échelle de ce rat, oui, ce bûcher

avait ses pentes, sa face nord et noire

d’humidité, sa casemate et son sommet crénelé,

et pour son intrépide curiosité ses soupiraux.


À mon échelle l’épouvantable amas

des coupes et des tailles, des ratissages

de deux ou trois années de prolifération et de fanes,

de génération et de putréfaction

(les racines si blanches du chiendent en surfilage,


un maillage serré de la surface,

à toute épreuve l’herbe à deux bouts quadrille

le foyer, donne l’échelle de l’histoire

que je fais avec le feu, le chat et le rat,

notre cohabitation vue à l’instant dans l’optique de la veduta,

cette fenêtre qui permit aux voyants de ne pas trop s’approcher du monde,

s’y brûler ?

La fenêtre à partir de laquelle l’histoire pourra être considérée ?)

 

mardi 26 mars 2024

À la boîte blanche, vues 306


 

Rien, donc

 

Rien, donc

obsessivement rien

(que les images).

 

Cet air seul qui étouffe le poème

(qui se nourrit d’air et suffoque trop aéré)

 

Rien que la cendre volatile que dévêt

le vent,

un lai mollement se laisse glisser

en vol

relève le cercle d’argile crue

dévoile plusieurs entrées de galeries.

 

L’œil limpide qui reposait sur moi.