mercredi 28 février 2018

Ce sont les mêmes allées séculaires



Ce sont les mêmes allées séculaires et chambres de verdure
où roulent les pommes qu’Hippomène pour Atalante
laisse
dans l’or que bordent les marronniers en septembre de 1973

et où parvenu à Daphné c'est un arbre qu'embrasse Apollon
le secourable
un arbre dont il fait son chant et son poème
sa couronne. Laurier sublime devient le désir d'Apollon. Ici sous les frênes

elle porte une robe à rayures
fort contraste du drap bayadère

et pousse le landau de mon frère c’est son premier enfant
dans le soleil
le landau bleu en carène semble un bateau
deux grandes roues comme à la fête
et blanches

dans les allées où les silex roulent sous la semelle
plus tard vers l’ombre de la chambre de Diane je cours ramasser les marrons
j’ai sept ans et n’ai promis d’épouser personne

Parc de Marly (5)




mardi 27 février 2018

Entre les fûts je suis l'enfant



Entre les fûts je suis l’enfant -
marronnier - lui qui vint, via Constantinople et Vienne, de Macédoine grecque et non d’Inde - 
entre les fûts des marronniers, c’est en hiver, les ombres grandissent
les noms me devancent et les ombres aussi
trament un monde,  Hippomène, Aesculus hippocastanum et Aphrodite
Hespérides encore, ne sachant au juste où
ce que j’entends je l’ignore
je regarde aux branches couler
l’or et sur le sol roulent les cailloux durs et amers dont on emplit les poches
- pas des pommes -

(Atalante trop vive à la course se baisse et trouve un époux
Daphné implore le fleuve son père et devient laurier au front d’Apollon solaire)

entre les fûts où silex et marrons roués polissent
un quatre coins ductile, surgit
une voix dans toutes celles -
entre toutes -
je cours sous les marronniers, Loup y es-tu ? plus loin des frênes
et les alignement de thuyas,
entre les fûts entre l’imparfait simple
du temps
j’ignorais enfant que le présent fût variable
à ce point
sous les arbres

Parc de Marly (4)




lundi 26 février 2018

Non pas des oies



Non pas des oies
des canards canadiens me dit-elle
si frêle assise au fauteuil où elle est
de skaï noir défoncé
son être je le vois tout au souvenir des faits
partant de joies pérennes

Parc de Marly (3)



dimanche 25 février 2018

Dans la longue mangeoire de béton



Dans la longue mangeoire de béton blanc
la découpe de nuit
matière noire où luit dans la baie un œil
en face les fenêtres s’éteignent une à une plongeant dans
l’énigme des vies
noirs les étages meubles dissociés fondent
en rangées instables des yeux comme vides
où les oiseaux ne montent pas
ni arbres ni maisons ni sons jamais
je ne vois que - beaucoup plus loin si loin - des chemins ronds
aux balises orangées
elles n’éclairent qu’elles-mêmes
ne mènent pas là où -
nulle part où ce soit déjà le jour -

je prolonge le jeu
rappelant les fenêtres comme des quartiers
de fête
en quelque sorte qui rend la nuit autour
plus dense
voici une pyramide renversée un demi octogone puis
un triangle isocèle
presque
une constellation
une dislocation
puis un désastre

Parc de Marly (2)




samedi 24 février 2018

Je me souviens



Je me souviens de l’abreuvoir
lieu si familier
qu’aujourd’hui je contourne pour
voir à la fin, enfin, passant voir
- les chevaux sont de pierre et m’épouvantent
cabrés sur ce qu’on ignore - que le palefrenier
mène, non désarçonnable, humain où vient
le soleil qui ensoleille
les oiseaux sortis d’eux-mêmes soudain hantent
oiseaux, primevères, anémones sylvies je me souviens
du peu de l’enfance furtive, abreuvoir, parc et statues
la mesure de toutes soifs, éblouie
coquillages et chutes, nudité, perspective :
qui étaient déjà sous ce roi centré l’ idée de nature


Je me souviens - le cœur inondé
la demi-lune incurvée où se projettent
dévalant Le Cœur volant
toutes les chutes
les catastrophes de justesse
évitées
l’ivresse
ne cherche rien

Deux cygnes-et-demi
- deux et l’aplomb de leur ombre - portée de signes -
sur l’eau verte les cercles grandissent
autour des têtes plongées repêchées
plongées  - des ondulations -
écho des œuvres vives

L’énigme de la blancheur
l’eau verte
ouverte la symétrie porte interrogative
leur indolence berce les cercles
d’une géométrie expansive

Parc de Marly





jeudi 22 février 2018

Des gouttes qui tombent



Des gouttes qui tombent,
irrégulièrement fond - on dirait des fientes –
la neige depuis le toit sur la palière
qu’elle creuse - à force - détourant les hélices fossiles
du calcaire coquillier ;
Le rideau de perles noircit chaque hiver
un peu plus - l’effet des moisissures -

Et depuis l’étage
c’est tout le paysage en contrebas
qui glisse
l’ordonnance polygonale des toits
fermes et hangars et clocher
qui filent
en biais ruinant dans la débâcle
le fier aplomb la ferme assurance
(tout ce qui m’est étranger ici
tout ce qui m’est énigme aussi)

mercredi 21 février 2018

Du blanc de neige au noir



Du blanc de neige au noir visqueux sans transition
allons bon !  Les mésanges - charbonnières cette fois -
en tous sens comme si quelque chose - mais quoi ?
je ne sais - advenait à l’horizon
duquel, moi, je ne vois rien. Voilà
j’essaie encore - comme toujours ! - de faire relation
de ce que j’ignore !

Il n’y a peut-être que ces mésanges qui
- disparues aussitôt qu’elles sont vues,
reviennent anonymes à la danse concentrique - soient parvenues
à embraser le sol, leur œil vif qui
puisse rénover toute la vision. Je ne sais
si c’est le sol ou mon regard, ou bien reverdie
la lumière qui change !


« Rien » est la force
Qui rénove le Monde –

mardi 20 février 2018

Neige, où prendrai-je ma respiration



Neige, où prendrai-je ma respiration ?
Enfermées maintenant
toutes les herbes toutes les 
gemmes
je ne vois pas où reprendre le vent
et où aller pour une fleur

Sinon prendre ce qui se donne, les tiennes
sont même, dans la nuit nègre,
celles qui sont vues le mieux
tu peux m’en donner encore et encore

Mais dessous aussi froids que pierres
je sais des faits de bourgeons
serrés - si fins si vifs en couleurs
ardeur retenue non avenue
j’aime leur ardeur novice et là retenue -
défient notre éveil

lundi 19 février 2018

Non / c'est d'abord une neige noire



Non
C’est d’abord une neige noire
qui se perd 
au fond des buissons   s’enfonce

puis lentement
elle cerne la haie tout entière
un seul massif parti
prend forme de l’informe
qui recèle éveil et cris

je ne cherche rien
qu’elle ne dérobe et révèle
en tombant
sur la haie aux oiseaux


N’est-ce pas précisément ce que nous sous-estimons qui s’amorce
à seule fin d’être, gracieusement ?

dimanche 18 février 2018

Les réserves



J'entre au jardin



J’entre au jardin, celui que verdiers et mésanges rassemblent
depuis quelques temps
j’entre avec
ce que je sais de la cendre
et reverse à la terre
la somme de mes gestes
de mes feux

qui tremble
un moment à l’extrémité des herbes
origans achillées
millefeuille et matricaires
grises comme en un philtre
qui n’abolit
ressuscite

aux branches du tilleul
en passant
la netteté des extrémités
une nouvelle
te frappe et cingle l’œil
la brise légère siffle
sur les pierres ouvertes
semer quoi quand ?



 





samedi 17 février 2018

Aujourd'hui j'ai vu le verdier


Aujourd’hui j’ai vu le verdier
son bec baiser la neige
un instant
avant qu’elle n’achève
sa forme - que sa fonte
sur le hallier
sur lui que la nuit déjà    une estompe
achève -
le verdier tombe comme tombe une pomme
mais inversement.

vendredi 16 février 2018

Les pieds marchent sur le vent



Les pieds marchent sur le vent
à défaut 
l’insuffisance des chemins
coupés le souffle court
voici parfois les ombres franches
qui découpent
un damier expansif
qui distend
l’ordonnance des champs
entre eux se fraye la voie oscillatoire


il est temps d’ouvrir les pierres

jeudi 15 février 2018

Toujours la grande échelle



Toujours la grande échelle découverte des chemins
l’équerre des ombres
l’aplomb de la forêt la
vitesse des fossés rivés à l’angle
mort toujours
toujours pour l’instant sans effroi


Faux robiniers et grandes herbes
dans l’essor commun
ce que nous voyons
à l’aune du mouvement
des touches des terres d’ombre
des verts


Le dévers des prés
croulants d’aube à midi
bleu gris une approximation de plus
de pluie
et fine brouille dyspnéique
discord un ocre mi-parti
et le chemin dérobé

mercredi 14 février 2018

Et comme je danse la danse intranquille



Et comme je danse la danse intranquille
mon trépied comme une ancre dans l’eau noire du miroir
pour revenir
remonter à l’échelle de tout lieu
commun
la vie ordinaire
du revenir du va et je reviens
du viens du désir où tu vas je vais
où tu es ?
faite d’échelles des gradations du tronc commun
de pieds et mains liés de coups de bout touchant
de distance de confidentialité
de traits des
marquages et des grades et les griffes des chiffres
au sol
danser pour soupeser.